L’orthopédie pédiatrique est une branche de la médecine spécialisée dans le diagnostic, le traitement et la prévention des troubles musculo-squelettiques chez les enfants, des nouveau-nés aux adolescents. Contrairement à l’orthopédie adulte, elle prend en compte le fait que les enfants sont en croissance constante et que leur squelette évolue rapidement. La connaissance de ces particularités biologiques est essentielle pour proposer une prise en charge adaptée, souvent différente de celle des adultes.

1. Les spécificités de l’enfant en orthopédie

Chez l’enfant, les os ne sont pas encore complètement ossifiés. Ils contiennent des cartilages de croissance (les plaques épiphysaires), qui permettent la croissance en longueur des os. Ces structures sont sensibles aux traumatismes et maladies, pouvant conduire à des anomalies de croissance si elles sont endommagées.

De plus, les enfants ont une capacité de remodelage osseux très élevée. Cela signifie qu’une déformation osseuse peut parfois se corriger spontanément avec le temps, ce qui influence le choix des traitements orthopédiques. Par conséquent, de nombreuses pathologies orthopédiques de l’enfant sont surveillées avant d’être traitées activement.

2. Les principales pathologies en orthopédie pédiatrique

L’orthopédie pédiatrique couvre une grande variété d’affections. Certaines sont congénitales (présentes dès la naissance), d’autres acquises au cours de la croissance.

a. Les malformations congénitales

• Pied bot varus équin : Malformation fréquente du pied, qui se présente tordu vers l’intérieur et vers le bas. Elle nécessite une prise en charge précoce, généralement par méthode de Ponseti (plâtres successifs).
• Luxation congénitale de la hanche (dysplasie développementale de la hanche) : Anomalie de développement de l’articulation de la hanche. Un dépistage par échographie est recommandé chez les nourrissons à risque.
• Malformations des membres (agénésies, polydactylies, syndactylies) : Ces anomalies des bras ou jambes nécessitent souvent une approche multidisciplinaire (orthopédie, chirurgie plastique, rééducation).

b. Les troubles de la croissance et de la posture

• Scoliose : Déviation latérale de la colonne vertébrale qui apparaît souvent à l’adolescence. Sa prise en charge dépend de l’angle de courbure (angle de Cobb) : surveillance, corset ou chirurgie.
• Genu valgum/varum (jambes en X ou en parenthèse) : Normal jusqu’à un certain âge, mais peut nécessiter une correction chirurgicale s’il persiste.
• Maladie de Blount : Trouble de la croissance du tibia causant une déformation vers l’intérieur.

c. Les pathologies traumatiques

Les enfants sont sujets aux fractures, mais celles-ci diffèrent des fractures adultes :

• Fractures en bois vert : Os partiellement cassé, fréquente chez les jeunes.
• Fractures de l’épiphyse (Salter-Harris) : Risquent de perturber la croissance osseuse.

Les entorses sont rares chez les jeunes enfants, car les ligaments sont plus résistants que les os à cet âge.

d. Les pathologies infectieuses et inflammatoires

• Arthrite septique : Infection d’une articulation, urgence médicale.
• Ostéomyélite : Infection osseuse qui nécessite un traitement antibiotique prolongé.
• Synovite aiguë transitoire de la hanche : Fréquente chez le jeune enfant, d’évolution bénigne.

e. Les maladies osseuses rares

Certaines pathologies génétiques affectent le squelette :

• Ostéogenèse imparfaite : Maladie du collagène entraînant une fragilité osseuse extrême.
• Dysplasies osseuses : Regroupent plusieurs maladies rares affectant la structure osseuse.

3. Méthodes diagnostiques en orthopédie pédiatrique

Le diagnostic repose sur plusieurs éléments :

• Anamnèse : Entretien avec les parents sur l’évolution des symptômes.
• Examen clinique : Observation de la posture, de la démarche, des amplitudes articulaires.
• Imagerie :
  • Radiographie : Outil de base.
  • Échographie : Utile notamment pour la hanche du nourrisson.
  • IRM/Scanner : Recherchés dans les cas complexes ou chirurgicaux.

Une attention particulière est portée à la croissance osseuse sur les clichés radiologiques.

4. Principes thérapeutiques

a. Traitement conservateur

Très utilisé en pédiatrie, il peut inclure :

• Rééducation fonctionnelle : Kinésithérapie adaptée.
• Orthèses : Appareils pour corriger ou soutenir une posture.
• Corsets : Notamment pour la scoliose.
• Plâtres : Pour fractures ou déformations.

b. Traitement chirurgical

Indiqué lorsque le traitement conservateur échoue ou d’emblée dans certaines pathologies :

• Chirurgie osseuse correctrice : Ostéotomies pour réaligner un os.
• Chirurgie arthroscopique : Moins invasive, utilisée notamment pour certaines pathologies du genou ou de la hanche.
• Allongement des membres : Techniques utilisant des fixateurs externes (ex. méthode d’Ilizarov).
• Pose de matériel d’ostéosynthèse : Plaques, vis, broches.

Les décisions sont toujours prises avec prudence, en tenant compte de la croissance restante.

5. Rôle de la prévention et du dépistage

Certaines pathologies, si elles sont diagnostiquées tôt, peuvent être corrigées sans séquelles. Cela souligne l’importance du suivi régulier des enfants, des examens de dépistage et d’un examen clinique soigneux dès la naissance.

Les campagnes de sensibilisation à la scoliose, au port du cartable, à la prévention des traumatismes dans le sport sont autant de leviers pour éviter des complications à long terme.

6. Place des parents et de l’interdisciplinarité

La prise en charge orthopédique d’un enfant ne peut se faire sans une collaboration étroite avec les parents. L’annonce d’une pathologie osseuse ou d’une malformation est souvent une source d’anxiété. L’écoute, l’éducation thérapeutique et le soutien psychologique sont essentiels.

De plus, la prise en charge fait souvent intervenir plusieurs professionnels : orthopédistes, pédiatres, kinésithérapeutes, ergothérapeutes, psychologues, éducateurs spécialisés.

Conclusion

L’orthopédie pédiatrique est une spécialité essentielle pour garantir un développement physique harmonieux chez l’enfant. Grâce aux avancées diagnostiques et thérapeutiques, de nombreuses pathologies autrefois invalidantes peuvent aujourd’hui être prises en charge efficacement. La vigilance des professionnels de santé, le rôle des parents et une approche pluridisciplinaire sont les piliers d’une orthopédie pédiatrique moderne, humaine et tournée vers l’avenir.